Les lianes - Conte de Tradition Orale

Autrefois, la vie était gaie dans la forêt vierge. Le jour, elle baignait dans la lumière du soleil, la nuit, la lune et les étoiles l'éclairaient. De grands arbres touffus poussaient partout, leur ombre protégeant les hommes du soleil, leurs vastes frondaisons les mettant à l'abri de la pluie, à la saison humide, lorsque des trombes d'eau tombaient du ciel. Les hommes bénissaient ces grands arbres qui devinrent alors trés arrogants, méprisant les plantes faibles des sous-bois.

Parmi ces plantes, les lianes étaient les plus faibles. Elles poussaient trés vite, mais n'avaient pas assez de force, ce qui les condamnait à ramper sur le sol au lieu de s'élever vers le ciel. Elles étaient la risée de tout le monde. Les grands arbres, quant à eux, les méprisaient au point de ne pas leur adresser la parole.

Un jour, la plus grande et la plus vieille des lianes en eut assez de l'arrogance des grands arbres et leur parla en ces termes :

«Grands arbres, pourquoi nous ignorez-vous ? Pourquoi ne voulez-vous pas nous parler ? Nous sommes les enfants de la même terre et parlons le même langage.»

La pauvre liane se fatiguait inutilement. Les grands arbres faisaient semblant de ne pas l'entendre. Sans se décourager, elle continua à les raisonner :

«Nous sommes aussi utiles que vous : nous retenons l'humidité de la saison des pluies et la gardons pour la forêt en attendant la saison sèche. Sans nous, un désert aride s'étendrait à cet endroit. Nous sommes aussi puissantes et importantes que vous.»

Le plus grand et le plus vieil arbre de la forêt prit alors la parole :

«Je ne crois pas que vous soyez aussi puissantes et importantes que vous le prétendez. Si tel était le cas, pourquoi ne pousseriez-vous pas droit vers le ciel comme le font toutes les plantes qui se respectent ?»

Il pencha ses branches vers la liane :

«Agrippe-toi si tu es si puissante et forte, et essaie de recourber mes branches encore plus vers le sol !»

La liane s'accrocha à la branche. Bien entendu, elle ne put la recourber, mais en se redressant, l'arbre la souleva et ne put s'en débarrasser. Les autres lianes s'enroulèrent autour du corps de la vieille liane pour grimper vers le haut et, très vite, tous les arbres et les buissons en furent envahis, gémissant sous leur poids. Cette masse végétale empêcha les rayons du soleil de pénétrer dans la forêt et, depuis ce temps-là, une obscurité humide et verdâtre ne cessa plus jamais d'y régner.